Metin Kutusu:

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Puis après, tu sais c'que je lui ai dit ? " Paysanne toi-même, imbécile ! Tu sais même pas t'farder les yeux. " Dis donc, t'as pas vu ses yeux hein ? Aie, mon sucre, grande perte ! J'suis très triste pour vous... Eh bien, ces cartes de jeux m'énervent ! Et moi qui allais faire de la divination avec, tu parles ! J'ouvre, j'rouvre et puis ça bloque quelque part. As de coeur ou quoi, se cache sauf pour m'embêter. Aie ! Mince ! Avec ces bigoudis qui commencent à me faire mal ! Attends, j'en enlève deux, ça me tranquilisera... Hi ! Puisqu'elle m'humilie, si elle savait quelque chose au moins ! Faut pas croire, hein, c'est d'la chance qu'elle a ! Je te jure qu'elle a aucune beauté. Avec tes habits de femme de ménage, t'es plus belle qu'elle.


Voilà, prends la poussière des canapés maintenant. Pas avec le détergent, avec l'alcool, d'accord ? Y'a de l'alcool et du coton dans le tiroir d'en bas. Aa ! Attends que je te l'donne moi - même. Je suis une femme qui aime le travail bien fait, mon sucre. J'aime pas que ma femme de ménage touche à toutes mes affaires. Aie ! Mince ! Ces souliers m'font mal aux pieds. C'est comme si, à chaque fois, je vais tomber. J'ai des amis et des ennemies, ils diront que j'sais pas marcher avec des chaussures à hauts talons.

 
Attends voir, voilà nettoie avec ça. Tu sais comment se farde-t-elle ? Tout foncé, comme ça. Et sur ses cils alors, du mascara, mais un de ces mascaras ! Je l'prendrai même pas en main. Du violet. On dit que le violet ne va pas aux blondes. C'est pour ça que j'utilise du mascara couleur melon. Melon foncé... Attention, n'appuie pas trop, n'abîme pas le canapé veux-tu ?... Alors j'y suis allée, la brune gringalette était là. Tu sais, elle ne m'aime pas cette chétive, elle me regarde de travers comme si je suis sa rivale. Elle boude toujours, elle fait tout pour me faire savoir qu'elle me déteste. Ce jour - là, c'était la même chose. A peine qu'elle m'a vue, elle a commencé à bouder. Cette carcasse se croit belle ! Elle l'est même pas. Ecoute, si le clou était beau, les quincailleries seraient pleines de belles femmes... Elle a une taille à voir ! On dirait plutôt un peuplier ! Puis après, son nez, j'crois pas, c'est le sien. Sur cette grande gueule d'assiette, un tout petit nez ! Quoique tu dises, c'est pas le sien ! J'te jure que si ce nez lui appartient, je couperais le mien, j'le hacerais et j'le donnerais aux chiens et…


Aie ! qu'est-ce que tu fais ? J'ai donné cent cinquante livres à ce coton. Attends voir ! Donne-moi le paquet. Prends, ça te suffira. Te vexe pas, mais vous les femmes de ménage, je sais pas pourquoi, vous êtes gaspillardes. Vous essayez de ruiner les gens. Gaspiller les choses, abîmer les meubles en leur ôtant leur vernis... Hier j'ai appelé quelqu'une pour la lessive. Le baril de... truc. Aie ! Qu'est - ce qu'on disait ? Tu vois, j'ai de nouveau oublié. A force de ne pas travailler on oublie. Ah oui, en parlant de travailer... La semaine prochaine ça fera deux ans que je vis avec un seul rein. Au fait, pourquoi est - ce que tu travailles toi ? C'est si bien de ne plus sentir l'haleine des autres. C'est triste, ton mari s'est tiré et ça faix six ans qu'il ne vous cherche plus... Et puis après, t'as quatre enfants. A ta place, j'resterai même pas un jour de plus... Regarde moi, je vis si bien. Je remercie le bon Dieu de cette annonce dans le journal... En quelques mois ma vie a changé. Et puis si l'on vivait sans rein, je vendrais aussi le second. Mais on m'a dit que c'est impossible. J'ai demandé, tu sais. Rien que pour ça, j'suis allée rendre visite au professeur. Ah ! Bien sûr que j'y suis allée ! J'allais quand même pas le demander aux nettoyeurs de l'hôpital, non ? Ces gens - là, même s'ils le savent, ils ne diront jamais la vérité, je te le jure qu'ils sont comme ça ! Ils sont jaloux quoi. Alors j'suis allée directement voir le professeur. Il m'a dit : " Mon enfant, t'es folle ? " Non, pourquoi est-ce que j's'rais folle ? Oui, c'est vrai à un moment de ma vie, je devenais folle. Pauvreté, misère !... Mais maintenant j'vais très bien. Dieu merci, j'ai tout c'que je veux. On peut louer un apart, on a une voiture même si elle n'est pas neuve. Regarde, j'ai de si beaux meubles ! J'ai un service en argent. Tu sais, j'adore les services en argent. Je s'rais folle si je n'avais pas de télé couleur. Et puis j'ai une femme de ménage qui vient tous les trois jours…


Excuse, tu me demandes si j'ai vendu mon rein hein ? J'ai bien entendu n'est - ce pas, tu me le demandes ? Bien sûr ma chère, je ne mens pas. Non, c'est pas à cause de pauvreté !... Ibrahim et moi, on travaillait tous les deux. Mais en ce temps - là on n'était pas encore mariés. Coquin d'Ibrahim, il retardait toujours la date du mariage. Parfois il disait qu'il n'avait pas le temps, parfois il prétendait qu'il avait besoin de temps pour avoir l'accord de son père. Puis après avoir vu le fric, il a oublié tout... Il est peut - être con, imbécile... mais au fond Ibrahim, est un bon garçon, tu sais. Il dit qu'on allait de toute façon se marier même sans ces trois millions. Mais il me faisait languir. Eh bien, il est beau gars. Moi aussi à sa place, je ferais la même chose... Hier, je lui ai dit : " Tu m'aimes pas, t'aimes mon fric... " Tu sais c'qu'il m'a dit : " Penses ce que tu veux, femme ! " Je me suis redressée comme ça, j'ai aggravé ma voix : " De toute façon j'le savais ", ai - je dis. " Je fais tout pour te plaire, mon maquillage, mes bijoux... Tu ne lèves même pas la tête pour me regarder. Salaud va, tu me trompes voilà ! " Tout d'un coup, tout feu tout flamme : " Tu sais, moi, j'm'en fiche Vesilé. Si tu veux, on peut tout de suite divorcer. " Alors il a pris sa veste qui était sur le canapé, et il se préparait à sortir. Mais j'ai eu une de ces peurs ! " Aie, qu'est - ce que t'as fait Vesile ! " me suis - je dit et j'ai couru vers lui en hurlant : " Non, mais non, voyons ! Non, mon Ibrahim, mon beau, mon diamant, ne pars surtout pas, d'accord ? J'te crois bien sûr, tu m'aimes pour moi. Pas pour mon fric..."


Aie ! Heu... soeurette, regarde voir... Qu'est-ce qu'on dit aux femmes de ménage... Attends voir... Comment qu'elle appelait, Mme Fikret ? Aie, j'me souviens plus... Bon, ça fait rien. Je lui demanderai la prochaine fois que j'la verrai. Attends que j'attache cette ficelle à mon doigt. Ça s'ra un signe... Comme ça je n'oublierai pas. Faut pas que je l'oublie, c'est important !


Aie ! Heu... soeurette ! Vous êtes surprise parce que j'ai vendu mon rein, n'est - ce pas ? Tout l'monde est comme toi. Ceux qui l'apprennent me regardent bizarrement. Ils me demandent si j'étais malade. Avec quoi j'aurai acheté la voiture, la télé couleur et le service en argent si j'étais malade. J'ai payé, en tout, cinquante milles livres pour ce service. C'est de l'argent plaqué allemand. C'est pour ça qu'c'est pas cher. Et alors ? L'argent ? L'argent allemand c'est mieux. Quand t'achètes un rouge à lèvres tu veux qu'il soit made in Europe... Aie, en parlant de femme de ménage... Si j'avais plus de fric, je prendrais une bonne. Tu sais, ces bonnes avec leur coiffe blanche sur leur tête, leur tablier en dantelle. Mais pas grosse et lourde, tu sais. Une petite demoiselle. J'l'ai dit à Ibrahim : " Vends, toi aussi, ton rein pour qu'on prenne une bonne. On mettra le fric à la banque et tu travailleras plus. Quoi travailler ? " Mais il veut pas l'salaud. Je te l'ai déjà dit, c'est pas moi qu'il aime, c'est mon fric. Et quand j'le lui dis, il engueule... Aie ! Y'a un problème avec les bonnes, tu sais... Ces bonnes, elles truquent les gens. Qu'est-ce qu'on disait ? Voilà, les chtarqueurs ! C'est comme ça qu'on les appelle les voleurs, n'est - ce pas ? Eh bien, c'est pas la honte de n'pas savoir hein ? j'apprendrai. Tout le monde n'apprend pas dans l'ventre de sa mère, non ? J'ai à peine vingt six ans…


Ah oui, il faut que je travaille à mes devoirs. Aie ! Heu... soeurette !... Vous pouvez m'donner c'livre jaune ? Que je travaille un peu. Ça fait deux jours que j'ai pas touché aux livres. On dit que je dois lire cinq, six pages par jour... Comme ça on ne devient plus inculte. Et même on devient intellectuel dans le temps. Dans quelques mois par exemple. Non, pas celui-là... Ça, c'est l'encyclopédie ou quoi... C'est seulement pour la décoration. Elle reste à sa place. Non ! Celui - là non plus ! L'autre, s'il te plaît. Oui, celui - là, l'été dernier je l'ai emmené en vacance, j'l'ai lu six fois. Les - bon - nes - ma - ni - ères... Oui, oui, c'était celui-là. Dans certains bouquins, y'a de vieux mots et je ne comprends rien du tout. Mais celui - là, il est très beau, tu sais. Quand je l'aurai terminé, je t'le donnerais, tu veux ? Aie ! Heu... soeurette, je vous parle... Vous voulez que j'te donne ce livre ? Bonne, comme vous voulez ! Mais vous savez, il est très beau ! Ça coule comme de l'eau, ça se lit très facile... Aie ! A-a-aie ! Qu'est - ce que t'fais ? Touche pas ! Surtout n'essaie pas de toucher ! Qu'est - ce qu'elles trouvent ces femmes de ménage, je m'le demande. Elles ne pensent qu'aux services en argent. Aie ! Heu !... soeurette ! Ecoute c'que j'vais dire, laisse de côté le service en argent, veux - tu mon chou. J'les nettoierai moi - même plus tard. Vous, prenez la poussière des tableaux, ça suffira... parce qu'ils ont leurs propres détergents. Je l'dirai à Ibrahim, il en achetera... Tu sais, il est un peu bébête, mais c'est un bon garçon, mon mari. Quoi que j'lui dise, il achète. En fait, il garde un peu de fric pour lui même, mais ça ne fait rien. Je lui dis : " Ecoute Ibrahim, j'te jure devant le bon Dieu que j'vais pas crier. Mais tu vas pas me mentir, d'accord ? A combien t'as acheté ce sac ? " Il replique vite : " Mais, je te l'ai déjà dit, Vesilé, cinq milles ! Tu ne comprends donc pas ? Tout juste cinq milles ! "


Cinq milles ! Il ne sait que de dire ça ! Et en plus, il parle en criant, tu sais. En effet, j'sais c'que je devrais lui dire, mais je me suis retenue. Eh bien, dès que j'lui crie dessus, il s'énerve et se prépare à partir... Cinq milles, ça se voit plus. Dans l'atelier d'épices, j'ai... Aie ! J'ai encore dit l'atelier... C'est comme si on travaillait dans un endroit qui n'est pas important. Mais c'tait quand même une fabrique l'endroit où j' travaillais il y a deux ans. Y avait tout juste six filles. Y avait le chef Suleyman et Fahrettin, le débile. Aie ! Il ne faisait que d'pincer les jambes des filles, imbécile !... Puis le comptable... Mais lui, y a rien à dire. C'était un beau garçon. Comme un acteur ! Ibrahim ne vaut pas sa moitié... Sa taille, sa carrure, ses yeux, son nez en l'air, sa moustache... J'en avais l'eau à la bouche quand je le voyais et il ne relevait même pas la tête. Bête va ! Gueule de singe ! Canard ! Pour qui il se prend, hein !... Un homme n'doit pas être autant dans les nuages. Il pourrait au moins regarder autour de lui. Qu'il aille au moins au ciné, dans un parc pour manger une glace ou quelque chose comme ça... Passer dans le quartier main dans la main, sauf pour crâner. Tu parles, rien de tout ça ! Essaie de penser un peu, que j'économise autant, que j'passe au magasin pour acheter les plus belles jupes à plis, les T-shirts... que j'donne plein d'fric aux crêmes et aux poudres et que lui, il me regarde même pas !... Ça m'énerve encore. Je lui casserai la tête si je l'attrape. Mais avant tout j'ai un compte à règler à Sabriyé. Qu'on m'appelle plus Vesilé, si j'lui fais pas payer à cette salaupe ! Elle va voir c'que ça veut dire se foutre de ma gueule. Elle m'a fait ressembler à une fille des rues avec le maquillage tout foncé qu'elle m'a fait !... Puis après elle a capturé l'mec. Quand j'lui dit, elle rougit... Mais elle se sent pas visée. Ce qui me parait, il habitait près d'chez elle, parfois ils venaient au boulot ensemble. Mensonges ! Elle prenait le mec chez elle. Gueule de singe, salaupe, si tu l'prenais pas dans ton lit, d'où venait les bleus sur ta gorge ? Et cette gueule de singe de comptable alors !... J'lui tournais autour et il mordait le cou de cette salaupe de Sabriyé... Aie ! Laisse tomber ! Laisse maintenant !... Quand j'y pense je m'énerve, je deviens moche. Alors que c'est jour de fête aujour'hui. Je dois prendre soin de ma beauté et de ma fraîcheur. Il se peut que j'aie des invités. Je voudrais pas qu'on me voit toute moche. Eh bien, qu'est-ce que je disais ?... Ah oui, le comptable ! A part ce con, y'avait un boiteux. A midi, il nous apportait notre repas, il nettoyait... Aie, le truc de cet homme... C'était un festival ma foi ! On était mort de rire. Il avait une grosseur devant, tu sais. Nous six filles, ça nous inquiétait. Un si gros sex, c'est pas possible... D'un côté on voulait savoir, d'un autre côté on avait peur. Y avait une fille, Sukriyé. Un jour, elle a dit qu'elle allait voir le truc de cet homme. Nous les autres, on a protesté. Elle nous a dit : " Vous en faites pas ! ". Sukriyé était un peu trop drôle, tu sais, un peu frivole... Nous, on croyait qu'elle allait le provoquer et... On avait peur pour elle. Les jours ont passé, puis à la fin, elle est venue en courant, toute essoufflée : " Courez vite, filles, allez dépêchez-vous ! " On a couru, et qu'est-ce qu'on a vu ! Tu sais, on avait enlevé nos chaussures et on a couru aux toilettes... Aie !Aie !Aie ! Et dire que son truc était aussi petit qu'un petit doigt... Tu sais c'qui l'agrossissait : un kyste ou quoi ! Enfin, voilà tout ! Chaque fois qu'on en parle, je m'souviens de cette histoire... Ouai, ouai, c'était pas un endroit aussi petit que ça. Y avait neuf ou dix personnes. C'était pas un petit atelier.

 
Enfin quand j'travaillais dans cette fabrique j'ai acheté un sac à cent cinquante livres. Il était si beau ! Il avait une grosse broche dessus, comme ça. Il brillait de tous ses feux... Ce con d'Ibrahim veut m'faire avaler que ce sac vaut cinq milles. Tu crois que j'vais avaler ça ! J'ai gagné ce fric avec mon rein. Il dit que c'est du cuir. Et alors ? C'est pas une raison pour acheter un tout p'tit sac à ce prix là. En plus, il a pas d'broche... Aie ! Touche pas à la tapisserie. J'ai payé tout juste dix milles livres à ces papiers peints. Ils ont des défauts, c'est pour ça qu'ils sont pas chers : Si c'était Ibrahim qui l'avait acheté, eh bien, pas moins vingt cinq ou trente milles ; la moitié dans la poche bien sûr... Ne touche plus à la tapisserie d'accord, chérie ? Ils salissent... Te vèxe pas mais je connais les femmes de ménage... Je crève de fatigue en essayant de protéger la tapisserie, le service en argent, les fauteuils. Vous n'êtes pas attentionnées. C'est pour ça que je prendrai la poussière moi -même. En fait, la tache là - bas n'est pas aussi voyante que ça. C'est Ibrahim qui les a sorties une fois, et c'est resté comme ça. J'ai pas pu nettoyer. Aie ! Qu'est-ce que tu veux, j'ai pas pu hein... Tu sais, j'ai oublié de faire le ménage. De toute façon j'ai même pas le temps. Coiffeur, manicure, teinture de cheveux, maquillage... Lire les journaux jusqu'au soir, les magazines pour savoir quelles actrices s'habillent comme ça, comment elles ont décoré leur maison. Les quelles ont de beaux amoureux... Les quels acteurs sont plus beaux qu'Ibrahim ?...

 
Puis travailler à mes devoirs... Aie, en parlant de faire les devoirs... Ce livre sert beaucoup. Quand t'es coincée dans un domaine, tu l'regardes. L'autre jour on avait un invité, un des copains de mon mari irait nous visiter... On a pensé toute une soirée ensemble. Que lui servir ? " Wisky " a dit Ibrahim. J'ai un peu refléchi... Bien sûr que je vais réfléchir ! J'vais pas accepter tout c'qu'il dit, non ?... Après il va dire que j'comprends rien à rien. Il pensera que j'ai pas de caractère. Il pensera qu'il pourra me diriger comme il veut. Il ne me demandera même plus mon avis. C'est pour ça que je reflèchis à tout ce qu'il dit. Tu sais c'qu'il s'est passé l'autre jour ? Assise dans un coin, je me repoudais, et d'un côté j'écoutais de la musique. Bien sûr que je l'écouterai. On dit que la musique alimente l'âme. Je l'écoute et j'alimente mon âme. Absorbée dans la musique, moi, et ce con vient m' demander son foulard. Eh bien, j'ai pas bougé d'ma place. J'ai fait comme si j'avais pas entendu. J'ai remis mon rouge à lèvres à sa place. J'ai pris le crayon pour mes yeux... Et celui - là est allé fermer la cassette... J'ai tourné la tête comme ça, j'ai vu qu'il me regarde avec des étincelles dans les yeux. " Je te parle ! Au lieu de te regarder dans le miroir, regarde un peu autour de toi ! Je te demande où se trouve mon foulard... " Il me dit ça, comme s'il faisait la bagarre au ciné... " Eee ! Qu'est-ce que j'en sais moi, mon cher. J'suis pas la gardienne de ton foulard non ? Il est probablement là où tu l'as mis la dernière fois ! " Et il a gueulé : " Ecoute Vesilé, tu fais toujours la même chose ! Avant que j'ouvre ma bouche, tu aboies... Si tu le répètes, je t'jure que je prends ma veste et j' pars... " Et il veut m' faire peur tu sais ? " Tire - toi, tire - toi, qu'est-c'que tu attends ! Mon apart, ma bagnole, mon fric... " Quand j'ai dit ça, je croyais qu'il s'apaiserait. Et qu'est - ce que je vois, soeurette... " Que le diable emporte ton apart, ta bagnole, ton fric, et même toi !... " Tout en hurlant comme ça, il cherche sa veste. Mais j'ai une de ces peurs ! " Attends mon Ibrahim, mon chéri ! Mon beau mari !... Je trouverai ton foulard et tout c'que tu veux. Ne pars surtout pas !... Mon fric, ma voiture ne valent rien à côté de toi. " Bien sûr que je dois parler comme ça... Enfin bref, on a opté pour le wisky... J'ai donné le fric à Ibrahim. Il est allé acheter des poissons avec le wisky. Aie ! Il s'y connait en poisson. Il vas pas acheter des poissons pourris. En bref, soeurette, il les a apporté et les a bien nettoyés. Il a haché les oignons, le persil, et a fait des frites à côté... Moi je faisais que lire pendant qu'il faisait frire les pommes. Y avait le bruit des poissons en train de frire qui venait jusque à moi. Il n'faisait que injurier chaque fois que l'huile lui venait au visage. Mais moi, je faisais pas attention à lui. J'faisais que de tourner les pages du livre. Aie ! Qu'est-c' que tu veux c' que je fasse d'autre ? C'est que l'invité qui devait venir, n'était pas n'importe qui, tu sais. Il ressemblait pas à mon oncle ou à celui d'Ibrahim. Il travaille dans la même entreprise de figuration qu'Ibrahim. Mon mari dit que si l'on lui donne satisfaction, il pourrait en souffler mot au régisseur, et comme ça, Ibrahim aurait de plus grand rôle... C'est pour ça qu'on a acheté le wisky. On acheterait donc pas de wisky au cousin d'Ibrahim ou à mon oncle. Une tasse de thé leur suffit. Puis j'ai regardé ce livre, et qu'est-c'que j'vois ? On n'offre pas de wisky avec du poisson ! ………..

L’HISTORE TRAGIQUE

ET UN PEU COMIQUE

D’UNE ANCIENNE
FEMME DE MENAGE

Extrait

MUSTAFA BALEL

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